Au cours de mes recherches sur la vie de mes aïeuls les GERARD, bachoteurs ou mariniers sur la Seine, j'ai trouvé cette étude consultable en ligne qui donne des informations intéressantes sur l'histoire de la navigation sur la Seine et sur ses dangers dus aux intempéries.
Je me permets de vous en livrer des extraits.
On connait bien sûr, et c'est tristement d'actualité, les crues :
" La convergence des affluents de la Seine vers le centre du Bassin Parisien (Yonne, Marne), des trombes d’eau, des nappes phréatiques saturées et un sol engorgé provoquent de brutales montées des eaux. Les crues dites à chaque fois du siècle (1856, 1876, 1910), celles qui élèvent l’eau de plus de 8 m sont très rares ; la plupart se bornent à hausser le niveau du fleuve à environ 5 à 6 m, hauteur suffisante pour provoquer des dégâts. C’est en 1719 qu’une échelle des crues est établie au pont de la Tournelle, premier pont de Paris en amont.
La crue de 1910 reste inscrite dans les mémoires du fait des nombreuses cartes postales témoignant de ses ravages. [ ] Le 26 février, l’eau monte jusqu’à 8,29 m au pont Royal, soit 84 cm de plus que celle de 1876, et 29 cm de plus que celle de 1740.
Les crues ordinaires sont générées soit par des fortes chutes de neige fondant rapidement, soit par de grandes pluies se succédant à plusieurs jours d’intervalle. Elles sont différentes des crues de débâcle qui, elles sont dues à la rapide fonte des glaces. Les inondations sont fréquentes et les archives offrent des descriptions intéressantes. En janvier 1649, la Seine connaît une crue majeure. De Corbeil à Paris, toute la plaine alluviale est sous les eaux. "
Mais le gel provoquait aussi de nombreux dégâts :
"Les glaces interrompent le trafic fluvial presque tous les hivers et cela dès les périodes anciennes. L’empereur Julien, à Lutèce entre 358 et 360, écrit dans le Misogopon « Rarement la rivière croit ou diminue ; telle qu’elle est en été, telle elle demeure en hiver. Or, il arriva que l’hiver que je passai à Lutèce fut d’une violence inaccoutumée : la rivière charriait des glaçons comme des carreaux de marbre ; ces glaçons bruts, larges, se pressant les uns les autres jusqu’à ce que, venant s’agglomérer, ils formassent un pont ».
Ces remarques sur les glaces sont également signalées au XVe siècle lors de l’occupation anglaise de Paris. En décembre 1421, [ ] « Et si disaient les mariniers qu’elle avait plus de 2 pieds d’épais [environ 0,70 m d’épaisseur], et bien y apparaissait, car on allait par-dessus, on y charpentait pieux pour mettre au-devant des moulins pour rompre la glace au dégel, ».
[ ] Les relevés des températures effectués par Louis Morin entre 1676 et 1713, médecin et botaniste de l’Académie des Sciences, soulignent des minima importants. On constate que quelques jours de froid très vif suffisent à figer les eaux, et qu’au long de ces 38 années, 11 mois de janvier ont connu des températures moyennes mensuelles négatives, et 3 hivers, des températures saisonnières négatives : certains jours, la température chute à –15, -16 et même –18°C.
La municipalité parisienne, au cours du mois de janvier 1709, fait même scier la glace pour dégager un chenal de navigation et rendre possible un semblant de trafic.
A la même période, un laboureur du sud de Paris, Pierre Petit, rapporte que la rivière [la Seine] a été arrêtée, c’est-à-dire s’est trouvée geler, 4 jours après le 6 janvier « ne telle sorte que les charrettes ont passé à charge sur la glace à Choisy-le-Roi ».
Pour les marchands et les voituriers qui sont parvenus à Paris avant le gel, commence une période d’immobilisation forcée, marquée par la crainte de la débâcle, qui provoque toujours des dégâts importants.
La mise en mouvement des blocs de glace ne manque jamais de détruire des embarcations et de faire des victimes : 11 bateaux font naufrage dans le port de Charenton, lors de la débâcle des glaces de février 1774, et 11 autres, sur 51, sont portés disparus dans le même port, lors de l’hiver 1788/1789, durant lequel les glaces, dont l’épaisseur atteignit 15 à 22 pouces, entre 40 à 60 cm, durèrent du 25 novembre au 15 janvier. Et au Port-à-l’Anglais, sur la Seine, sur 54 qui étaient au port, seul 28 furent sauvés au cours du mois de janvier 1789.
Les pertes pour les marchands approvisionnant la capitale peuvent donc être considérables. En janvier 1742, François Gironde, un voiturier par eau demeurant à Limon en Auvergne, explique son retard. « Il dit qu’il aurait amené dans trois bateaux la quantité de 260 poinçons de vin tant pleins que vides lesquels sont actuellement au port d’Ablon … qu’ils seraient arrivés le 4 de ce mois sur les 4h du soir au port d’où ils n’ont pu lâcher attendu les glaces survenues, qu’il puisse constater l’impossibilité qu’il y a de lâcher les 3 bateaux tant à cause qu’ils sont entourés des glaces qu’à cause que la rivière n’est point navigable par la quantité de glaçons dont elle est couverte ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire